La Coupe Davis est morte, vive la Coupe Davis

Tout change, sauf le nom. La coupe Davis telle qu’on la connaît aujourd’hui prendra fin en novembre prochain. Terminé le tournoi sur une année, et ses duels sur trois jours avec quatre simples et un double. Dès 2019, l’ITF (International Tennis Federation) a décidé de passer à une compétition sur terrain neutre en sept jours en fin novembre, basée sur le même format que les Coupes du monde d’autres sports. La décision fait polémique, mais le changement devenait nécessaire.

« On vient de tuer la Coupe Davis ! » Nicolas Mahut commente le premier aux journalistes de l’Equipe la réforme de la compétition qu’il a gagnée, en novembre dernier, avec l’équipe de France. L’Angevin n’y va pas de main morte, et il n’est pas le seul à tenir cette position dans le monde du tennis. Mais qu’est-il reproché à ce nouveau projet ? L’ITF veut révolutionner la Coupe Davis, en perte de vitesse depuis quelques années déjà. Mais voilà, réformer une telle institution, vieille de plus d’un siècle, n’est pas chose simple. Le format des cinq matchs en cinq sets (quatre simples et un double) sur un week-end était bien installé, mais un peu dépassé. Aujourd’hui, les matchs se multiplient, et logiquement, pour la forme physique des joueurs, leur durée diminue. La réforme de la Coupe Davis est quasi-révolutionnaire, mais va dans l’air du temps du tennis.

Mais ce n’est pas le seul reproche adressé à la nouvelle Coupe Davis. Une des caractéristiques même de la compétition passe à la trappe : les matchs à domicile. Dès 2019, le Saladier d’argent sera disputé en Asie. Pas plus de précisions pour l’instant sur le pays hôte, ou sur la durée de cet accueil. Cette décision marque la fin des ambiances locales. Les supporters à domicile savaient animer la rencontre – prenez l’exemple du Stade Pierre-Mauroy de Lille, enflammé par la rivalité entre Belges et Français, en novembre dernier. Un an avant, lors de la finale Argentine-Croatie, l’ambiance sud-américaine faisait même penser à un stade de football.

En Asie, la passion ne sera pas la même, sans aucun doute. La priorité n’était pas là pour l’ITF, qui voulait redynamiser l’épreuve. Si la dernière Coupe Davis a passionné la France, c’est uniquement grâce aux performances des Pouille, Gasquet, Tsonga et leur bande. La finale de 2016 n’a pas suscité le même engouement en France, et la victoire argentine était passée inaperçue. En fait, seuls les pays concernés par la compétition s’intéressent à la finale, ce qui, à l’heure des droits télé et des bénéfices dans le sport, paraît totalement anachronique. L’aspect financier a évidemment été capital dans la décision. Réunir toute la compétition en une semaine permet ainsi de concentrer les spectateurs sur l’événement. La Coupe Davis d’aujourd’hui, étalée sur plusieurs mois, perd de l’audience au niveau international à chaque tour franchi.

Et de ce point de vue, le retour des grandes stars qui snobent depuis quelques années déjà la compétition est nécessaire. Depuis leur première victoire sous les couleurs de leur pays, Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic ne viennent plus (ou très rarement) sur les courts de la Coupe Davis. Mais les grands joueurs du circuit ne sont pas les seuls à se plaindre. Les « seconds couteaux » du circuit ATP se plaignent aussi d’un calendrier surchargé. Cette réforme offre – pour l’instant – quelques plages de repos dans l’année… tout en allongeant la durée de la saison, en rajoutant une semaine de jeu en plus avant les vacances.

Malgré les protestations des joueurs depuis l’annonce de la réforme, ceux-ci militaient pour le changement de la Coupe Davis. « J’étais le premier à dire qu’il fallait la réformer, explique Nicolas Mahut à l’Equipe. (…) Je pense qu’il fallait plutôt jouer sur la rareté de l’événement, un peu à l’image d’une Ryder Cup, en golf, qui se dispute tous les deux ans. » Le monde du tennis est ainsi bien divisé sur le sujet. Des joueurs comme Rafael Nadal, Boris Becker et David Goffin, ou des anciens comme Andy Roddick ont publiquement apporté leur soutien à la réforme. Face à eux, Yannick Noah, Jurgen Melzer ou encore Amélie Mauresmo ont exprimé leur désaccord sur Twitter.

Pourtant, tous tombaient d’accord. Il fallait du changement. La Fédération Internationale de Tennis a donné un grand coup de pied dans la fourmilière. Les réactions ont plu, mais le débat n’est pas fermé. En août prochain, à Orlando, l’ITF décidera ou non d’entériner ce nouveau projet. D’ici là, les points de vue continuent de s’affronter. Ce format de Coupe Davis va mourir, un autre le remplacera.

Baptiste Allaire

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