Diane Parry : le futur était de l’autre côté de la rue

À 15 ans, Diane Parry fait partie de la relève du tennis féminin français. Calme et réfléchie, elle a pris la route du haut-niveau avec sérénité. Aujourd’hui 33ème joueuse mondiale chez les juniors, elle travaille au quotidien et passe les étapes une à une avec succès.

 

On ne vit jamais très loin de son destin. 8 ans. L’enfance. Diane Parry rêve. Dans un moment d’égarement, elle regarde par la fenêtre de la salle de classe de l’école primaire Dupanloup de Boulogne Billancourt. Dans ses yeux, déjà, les terrains ocres de Roland Garros. Sept années plus tard, elle n’est plus très loin de revenir en joueuse professionnelle sur les courts de ses moments d’errance. Traverser la rue pour passer des cours d’école aux courts de tennis ? Diane l’a déjà fait. Scolarisée à la cité scolaire Jean de La Fontaine, au 1er Place de la porte Molitor à Paris, elle a quitté les lieux pour intégrer le Centre National d’Entrainement de la FFT, au… 4 Place de la porte Molitor. En passant sur le trottoir d’en face, depuis un an et demi, l’emploi du temps de Diane a changé. Mais pas sa vie. « L’arrivée au CNE n’a pas bousculé mes habitudes, j’habite toujours chez mes parents et j’effectue les mêmes trajets que lorsque j’étais au collège. » Amenée au Tennis Club de Boulogne-Billancourt à l’âge de 5 ans pour accompagner son grand frère –elle y est toujours licenciée-, l’étudiante en seconde ne semble pas avoir de mal à organiser sa vie. Quand elle n’est pas en tournoi à l’étranger, la Parisienne jongle entre entraînements et cours par visio-conférence à un rythme effréné. Du lundi au samedi midi, elle peut arriver à 8 h 30 le matin et repartir jusqu’à 19 h 30 le soir. « Sur les semaines de travail foncier, quand on fait quatre à cinq semaines d’entrainement au CNE, il y a deux séances de tennis et trois séances de physique par jour. » Avec une telle charge de travail, l’étudiante en seconde qui se dirige vers la filière scientifique pourrait avoir envie de se plaindre. Ce n’est pas son genre.

 

« Je ne suis pas quelqu’un qui stresse beaucoup »

 

Diane Parry est calme, détendue, facile à vivre. Un atout au moment de se préparer avant d’aller sur le court. « Je ne suis pas quelqu’un qui stresse beaucoup, explique la jeune femme en toute décontraction. Je suis assez cool. » C’est 30 minutes avant le début du match, pour son échauffement, que la jeune fille se met dans sa bulle. À chaque rencontre, elle se fixe des « objectifs d’avant match ». Une sorte de liste des choses à mettre en place sur le court, élaborée selon ses entraînements et ses précédents matchs. Pas un rituel. Simplement de la concentration et de la méthode. La jeune fille de 15 ans est assez forte dans la tête, elle apprend facilement de ses erreurs pour rebondir rapidement.

 

Technicienne et attaquante

 

Sur le terrain, la « Diane relax » laisse place à la « Diane compétitrice et offensive. » La joueuse a une large palette de coup dans sa raquette. Et elle s’en sert en proposant un jeu construit et réfléchi. À son image. Quand elle frappe une balle, elle dispose de deux ou trois options de coups. Grâce à son revers à une main- le même que Federer, son idole- avec lequel elle peut énormément varier ses frappes. Mais surtout grâce à son coup droit « mon meilleur coup, celui qui me permet de prendre le plus de point ». Des capacités techniques qui compensent « un léger retard physique sur ses adversaires. » Car Diane Parry n’a pas été épargné par la blessure. A 12 ans, elle est atteinte d’une scoliose, qui l’a fait arrêter le tennis pendant 6 mois pour retravailler sa posture. « J’ai mis un corset et puis j’ai immédiatement repris le tennis assure la jeune joueuse, déterminée. Je devais le mettre quatorze heures sur vingt-quatre et je l’enlevais quand je jouais. » Le corset, elle le gardait sur elle il y a encore un an. Depuis son entrée au CNE elle bénéficie de tous les équipements du centre.

 

Des résultats probants

 

Grâce au travail de renforcement en salle ou en piscine et aux soins avec les kinés, la blessure de Diane est aujourd’hui derrière elle. Sans douleur elle avance et réalise des performances intéressantes chez les juniors. Le 1er avril elle a remporté le Trofeo Juan Carlos Ferrero, du nom de l’ancien numéro 1 mondial espagnol. Un tournoi de Grade 1, la troisième catégorie junior. Une semaine plus tôt elle était arrivée en finale d’un tournoi de Grade 2. Avec deux tournois remportés elle réalise également des performances très satisfaisantes en double, une discipline qu’elle « adore » et dans laquelle elle peut pratiquer son jeu offensif en montant filet. Diane a participé à la Winter Cup, une compétition par équipe rassemblant les meilleures joueuses de moins de 16 ans parmi les nations européennes. Leader de l’équipe de France, elle a mené son équipe jusqu’en demi-finale, en s’alignant en double et en simple.

 

 


Le travail entrepris par Diane Parry commence à porter ses fruits. La tête froide, elle préfère penser à court terme. « Cette saison j’aimerais essayer de rentrer dans tous les tableaux des grands chelems juniors par mon classement. » assure la 33ème joueuse mondiale de sa catégorie d’âge. Plus timidement : « J’espère être bien classée au classement WTA d’ici 10 ans ose la parisienne. Jouer sur les Grands Chelems serait un rêve. » Le même qu’elle faisait déjà dans la salle de classe de son école primaire.

Antoine Decarne

Dans les pas de Julie Coin

 

Diane Parry et Julie Coin entourent Carlos Ferrero après la victoire de Diane en Espagne.
Devenue entraîneur dès la fin de sa carrière, Julie Coin ancienne 60ème mondiale, accompagne Diane Parry depuis 2 ans. D’abord en binôme avec Pierre Cherret, devenue depuis DTN, elle est seule aux côtés de Diane désormais.  Habituée à entrainer Madison Brengle, une américaine 97ème mondiale, elle a appris à gérer une jeune joueuse, qu’il faut faire grandir. 

 

LE CARACTÈRE DE DIANE

« Diane est facile à vivre et toujours partante pour faire pas mal de truc. Quand nous ne sommes pas sur le terrain et que nous sommes en tournoi, nous essayons de profiter des pays dans lesquels nous sommes pour les visiter. Elle adore les voyages et elle est toujours partante pour faire les choses. »

LEUR RELATION

« Nous avons développé une relation de confiance. Nous voyageons beaucoup et en tournoi c’est vrai que nous sommes tout le temps ensemble et que nous faisons tout ensemble. À cet âge-là on ne parle pas énormément et on n’ose pas forcement se livrer. Peut-être qu’elle est aussi un peu réservée. Mais avec le temps j’ai l’impression qu’elle arrive de plus en plus à me parler et à me confier certaines choses. On peut mieux travailler derrière. »

SES QUALITÉS 

« C’est une fille qui n’a pas peur de grand-chose, qui n’a pas peur d’aller de l’avant. Elle est prête à prendre des risques pour gagner, même s’ils ne paieront pas toujours mais elle sait que c’est par là que ça va passer. Et puis elle a vraiment un jeu atypique pour les filles. Elle ne joue pas en force avec des grosses frappes. Son style de jeu est un atout. »

« J’aurais rêvé avoir autant d’options qu’elle. »
SES AXES DE PROGRESSION  

« Il faut trouver un peu de régularité dans ce qu’elle fait. C’est réussir à être la plus constante possible dans une année. Surtout elle doit progresser physiquement. D’autant plus avec un revers à une main. Quand on frappe fort dessus, c’est un peu plus dur de tenir la raquette. Il faut avoir le poignet solide.  Pour avoir un revers à une main, il faut peut-être être encore plus forte physiquement que les autres et pour cela il va falloir continuer de travailler très dur. Des joueuses qui utilisaient le revers à une main comme Justine Henin ou Amélie Mauresmo étaient assez hors normes physiquement. Il va falloir la rendre plus puissante et plus endurante. »

LEURS SIMILITUDES 

« Il y a des ressemblances au niveau du jeu : j’avais un bon coup droit. Après je pense qu’elle a beaucoup plus de choix au moment de taper la balle. J’aurais rêvé avoir autant d’options qu’elle. Je n’avais pas un aussi bon toucher également. Au niveau physique par contre j’étais un peu meilleure. Et au niveau de la personnalité nous sommes un peu différentes. Moi j’étais beaucoup plus expressive. Elle, c’est quelque chose qu’elle doit développer. Elle est parfois un peu trop gentille. »

Propos recueillis par Antoine Decarne

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