Au Centre national d’entraînement du tennis, la Franco-Néerlandaise Julie Belgraver, évolue dans le sillage de sa mère, Noëlle Van Lottum. Cette ancienne pro garde un œil discret sur sa fille. Un cadre idéal pour progresser.
« Les meilleurs s’entraînent ici. » Noëlle Van Lottum n’a pas laissé sa fille, Julie Belgraver, 16 ans, rejoindre le CNE pour rien. Demi-finaliste du double juniors filles à Roland-Garros en 2018, avec Loudmilla Bencheikh, la jeune joueuse franco-néerlandaise s’épanouit depuis septembre 2018 au sein de la structure parisienne.
Il faut dire que le Centre national d’entraînement de la fédération française de tennis n’aurait pu trouver meilleur cadre. Implanté dans le XVIe arrondissement, l’espace de 11 000 m2 jouit d’une localisation imprégnée par l’effort. A quelques centaines de mètres, le Parc des Princes et le Stade Jean-Bouin résonnent encore. Non loin, l’extension du Stade Roland-Garros goudronne pas à pas le petit poumon des serres d’Auteuil, seulement séparé de l’Hippodrome éponyme par le boulevard périphérique.
Dans ce quartier où se croisent immeubles cossus et automobilistes en retard, le sport respire et le tennis vit.
« Je n’ai jamais entraîné ma fille »
Arrivée au centre en septembre 2018 Julie Belgraver n’a pas débarqué en terrain totalement inconnu. Au-delà de ses prouesses sportives réalisées quelques mois auparavant sur l’ocre parisien, la droitière de La Haye, a pu compter sur l’expérience de sa mère, Noëlle Van Lottum. « Je connais bien cet environnement. Dans ma jeunesse, j’ai fait deux ans à l’INSEP et trois ans au CNE. Même si bien sûr, 25 ans plus tard les choses ont changé », raconte l’ancienne 59e joueuse mondiale, reconvertie depuis 2004 comme entraîneure.
Si elle avait décidé de défendre les couleurs de la France, son petit frère John Van Lottum s’était lui illustré pour les Pays-Bas, atteignant le 62e rang ATP en 1979. Deux drapeaux, du talent, une mère et un oncle passés pro sans compter un père entraîneur, telle est la pression qui aurait pu étouffer Julie Belgraver.
Pourtant, la jeune fille se tourne d’elle-même vers la petite balle jaune. « Je n’ai jamais voulu la forcer à faire du tennis. Elle a trouvé son chemin toute seule, notamment après avoir fait du hockey sur gazon ou de la gymnastique. C’est vraiment sa voie à elle», se remémore sa mère.
Celle-ci n’assiste que rarement aux entraînements. « Quand elle a été sélectionnée au CNE et qu’on m’a appelé pour y travailler, elle m’a dit « oui, à la condition que tu ne te mêles pas de mon tennis. » Et pour moi, c’était important de respecter ça. Je ne l’ai jamais entraînée, il faut un équilibre familial. C’est le plus important ». Au CNE, chacune a donc trouvé sa place, naturellement, dans cette usine à champions ultra-perfectionnée.
Sur les six courts bleu azur que compte la grande structure inaugurée en 2015, rien n’interrompt le ballet des rebonds jaunes. Un mince filet sépare chaque terrain, où entraîneurs et poulains se donnent tout autant.
Au fond, Richard Gasquet, Nicolas Mahut ou Gilles Simon rivalisent de puissance. Plus bas, un groupe de jeunes filles s’exerce au service. Le présent s’entretient, l’avenir se prépare. Nichées, des caméras sont prêtes à enregistrer les moindres séquences et à délivrer les si précieuses statistiques. Un brouhaha studieux agrémente l’écho des balles qui vibrent au choc des raquettes. Les coursives, discrètes, offrent un large panorama sur ce spectacle composé au gré des allées et venues des champions d’aujourd’hui et de demain.
L’amour du jeu
Au centre des terrains, Julie Belgraver enchaîne les coups droits. En vis-à-vis, son entraîneur Gabriel Urpi distille les remises à la cuillère.
Joueur méconnu du circuit des années 1980, il fut 106e mondial, cet Espagnol au petit gabarit (1,73m) s’est reconverti à succès dans l’entraînement. Avec notamment Arantxa Sanchez, Flavia Pennetta ou Elina Svitolina comme disciples. « Je lui fais totalement confiance, il a une expertise énorme », appuie Noëlle Van Lottum.
Sérieux, mais motivant, le technicien espagnol semble entretenir une relation de confiance avec son élève du jour. Julie Belgraver se distingue par la puissance de ses frappes. Longiligne avec « un jeu opposé » à celui de sa mère, « dans un autre style et un autre gabarit. La seule chose que nous ayons vraiment sportivement en commun, c’est notre amour du jeu. » Une passion qui entraîne la jeune fille dans un rythme exigeant.
Sur le court, l’entraînement du jour est prévu pour deux heures. Voilà déjà trente minutes que la jeune fille donne tout. « Souvent, il y a une partie technique et puis des points. Mon coup fort, c’est mon service », explique-t-elle, encore pleine d’énergie malgré une intense séance de préparation physique réalisée en amont, quelques couloirs plus loin.
« Pour développer la vitesse, l’explosivité et la force » avec des programmes individuels et adaptés à chaque joueur. Au CNE, tout est centralisé en un seul campus, des courts aux salles d’entraînement, en passant par les chambres. Les horaires sont millimétrés.
De beaux progrès réalisés et des marches à franchir
Pas de quoi atténuer la passion de la jeune fille, véritable boule d’émotion. Son visage, traduit tantôt le rire, tantôt l’exaspération, en passant par la tristesse et parfois la lassitude. Au gré de l’entraînement. « Sois capable de tenir ce rythme et tu vas rapidement progresser », l’encourage Gabriel Urpi sur le court. La jeune femme dispose d’une certaine marge.
Classée 81e à l’ITF Juniors, Julie Belgraver occupait le 310e rang il y a tout juste un an. Onzième joueuse française dans la catégorie, elle serait numéro une nationale si elle avait choisi de défendre les couleurs néerlandaises. Son évolution récompense des résultats probants. Notamment sur terre, surface où elle réalise ses performances les plus convaincantes avec deux demi-finales en Grade 2, à Vinaros en mars et au Cap d’Ail en avril.
La Franco-Batave a également confirmé ses belles prédispositions pour le double, en remportant un tournoi de Grade 2 à Istres avec Mylene Halemai, son deuxième succès dans la catégorie un an après sa victoire sur la Panaceo Junior Cup. Par ailleurs, elle a remporté son premier tournoi de la saison à Maribor, en décembre dernier, sur synthétique. L’an passé, Julie s’était montrée sur les championnats de France des 15/16 ans, atteignant les quarts en simple et la finale en double, et avec son club de Denain. Encourageant.
« Ici, au CNE, il y a tout pour réussir », se réjouit Noëlle Van Lottum. « C’est l’envie et le travail qui emmènent ensuite vers le professionnalisme, à savoir une place dans le top 100 mondial ». L’ancienne adversaire de Steffi Graff sur le gazon de Wimbledon ne sait pas si sa fille atteindra un jour ce niveau. Mais qu’importe, car « le succès, c’est l’épanouissement personnel. C’est peut-être bête…»
Waldemar de Laage
Julie Belgraver
Franco-néerlandaise
16 ans (4 juillet 2002)
Droitière
Classement ITF Juniors : 81e (21 avril 2019), 11e joueuse française
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