Max Westphal a tout d’un grand

Il joue au tennis depuis l’âge de quatre ans et fait aujourd’hui partie du top 3 français de sa génération. Licencié au TC Chevry 2 de la Ligue d’Essonne, Max Westphal a le potentiel pour viser très haut. Il peut surtout compter sur une maturité bien au-dessus de la moyenne pour réaliser son rêve : devenir l’un des meilleurs joueurs du monde.

 

Dimanche 15 avril 2018. Aéroport de Roissy Charles Gaulle. Terminal 3. Vol n°492 en direction de Majorque, Espagne. Ou plus précisément Manacor. Deuxième ville de l’île réputée pour ses perles de culture de fabrication artisanale, mais surtout pour sa perle : Rafael Nadal. Le Majorcain y a installé son académie de tennis depuis juin 2016. Max Westphal, fan de Rafa, a été invité à passer une semaine d’entraînement sur la terre ocre de la péninsule. Un voyage comme le natif de Massy en fait régulièrement au cours d’une saison. Mais depuis quelque temps, en plus de sa casquette de joueur, Max a enfilé la tenue de gentil organisateur.

« Jusqu’à l’année dernière, mon père faisait beaucoup de choses pour moi dans le tennis, il m’inscrivait aux tournois, venait avec moi, il passait beaucoup de temps à m’accompagner, confie Max. Maintenant qu’il a changé de boulot, il est moins disponible. Et avec mes coachs, ils veulent que je sois de plus en plus autonome. Aujourd’hui, je réussis à faire plein de choses tout seul. C’est ce qu’il faut faire, ne pas toujours se reposer sur les autres. »

Autonome, le mot est lâché. A bientôt 15 ans (il les aura le 3 juin), Max est à une période charnière de sa vie et de sa jeune carrière. Passé de l’enfance à l’adolescence. Du gamin talentueux au futur top player. La route du succès passe par une plus grande autonomie. Mais Max est déjà un « adulescent ». Il sait que le chemin sera long et s’attache à grandir plus vite que la moyenne.

 

Vers le 100% d’autonomie

 

« Pour me déplacer ou aller quelque part, j’essaye de faire en sorte que ce ne soit pas toujours mes parents qui m’amènent. Quand je vais en tournoi, je regarde où est le tournoi, où sont les hôtels à proximité, le trajet, et je réserve les billets, les chambres. » Une vraie petite agence de voyage à lui tout seul, en somme. A son âge, ça interpelle. Voulu par son entourage, ce gain d’autonomie est nécessaire à son développement. Personnel et tennistique. Il lui vient d’ailleurs de son cercle familial. De sa mère Delphine, hollandaise d’origine ex-coach pour enfants, mariée à Pierre, directeur certification dans une multinationale. Depuis toujours, ils prônent une éducation basée sur le « do it yourself ».  « On a habitué nos enfants à être autonome et à s’organiser, admet le papa. Cette année, je dois dire qu’on a lâché beaucoup plus qu’auparavant. Il doit plus se prendre en mains, cela fait partie des objectifs que l’on s’est fixé, et il y arrive. On lui demande des choses un peu incroyables et il les fait. Il les fait bien et il apprend vite. »

Ce mode d’apprentissage est également partagé par l’équipe de coachs qui encadre Max. Frédéric Chopard, l’entraîneur de club, est à ses côtés depuis toujours. Le coach de la Ligue Thomas Leonetti suit Max depuis maintenant sept ans. Pour Thomas, pas question de caresser Max dans le sens du poil ni de le surprotéger, bien au contraire. « Je trouve que ses parents sont bons dans le laisser-faire. Nous, Fred et moi, on est friand de ça. On a des enfants et on les élève comme ça. Sur la base du « vas-y je te mets dans la merde, démerde-toi. On croit beaucoup en cela. On ne l’a pas rendu dépendant de nous. » Le principal intéressé se plie bien volontiers à la méthode. « C’est vrai que si tes parents ou ton coach font tout pour toi, tu ne peux pas forcément prendre la valeur des choses, reconnaît Max avec la maturité qui le caractérise. Tu ne te rends pas compte de tout ce qu’il y a derrière, tandis que quand c’est toi qui fait tout, qui met tout en place, tu prends vraiment conscience que c’est beaucoup d’organisation. »

 

Autonome mais entouré

 

Du haut de ses 1,81 m, le gamin a intégré ça depuis quelques temps déjà. Et pas seulement dans le tennis. « Ça fait trois ans maintenant que je suis les cours à distance avec le CNED (Centre National d’Enseignement à distance). Au début, c’était un peu dur car je restais tout seul, je ne voyais plus mes amis. Je n’ai pas de prof, sauf pour l’espagnol et ma mère pour l’anglais. Donc tu dois travailler tout seul, tu restes tout le temps chez toi etc. Mais je me suis habitué et je suis un peu solitaire, ça ne me dérange pas d’être tout seul. » Solitaire mais pas esseulé. Autour de lui s’est construit une véritable petite équipe. En plus des deux coachs, Max peut compter sur un entraîneur physique, un préparateur mental et un kiné. Là encore, son évolution se fait sentir. « Il est devenu beaucoup plus participatif, parce qu’on l’a rendu comme ça. On a voulu que ce soit comme ça, pour qu’il puisse se débrouiller à terme beaucoup plus tout seul, insiste Leonetti. Malgré le fait d’être chez soi, malgré le fait d’avoir une structure privilégiée et unique, avec cette association club-ligue. »

Côté court, à l’heure où les jeunes de son âge passent leur temps sur leurs smartphones ou devant leurs consoles, Max mange, boit et dort tennis. Il n’a nul besoin qu’on soit derrière lui. Le jeune homme s’impose une exigence de travail à la hauteur du défi qui est le sien. « A l’entraînement, c’est le premier arrivé, le premier qui s’échauffe, la routine d’échauffement il l’a fait tout seul. Donc toi quand tu arrives, t’as un peu la pression » avoue Thomas. A Manacor ou ailleurs, le joueur classé 1/6 est un bourreau de travail. Il use même ses coaches et va de lui-même faire le quart d’heure en plus, la répétition de gammes supplémentaire. Seul, comme un grand. « Pendant un tournoi, quand tu as fait 4h30 d’entraînement en face de lui, t’en peux plus quoi, concède le coach. Mais lui est capable d’y retourner. Il va faire 40, 50 services, trouver un mec pour retaper etc. Là-dessus, je n’en ai pas vu beaucoup d’autres le faire. Quelques-uns le font sur un ou deux tournois, mais pas sur la durée comme lui. » Le gamin est demandeur et pro-actif. Dans son club à Gif-sur-Yvette, comme hors des frontières. Il prend les devants, anticipe, dicte l’échange. « Vivre une journée d’entraînement avec lui à l’étranger, c’est tout simple, ce n’est pas moi qui le tire, c’est lui qui me tire, confesse le coach. C’est lui qui dit la veille “je vais me lever à telle heure demain, rendez-vous à telle heure au petit dej’, on part pour telle heure“. Sur pleins de points, il est acteur de son projet », poursuit Leonetti.

Son projet ? Faire du tennis son métier. Avec une ambition : atteindre les sommets. Mais Max est du genre pragmatique. Il avance point par point, step by step. « La prochaine étape c’est de partir à l’étranger tout seul, admet-il. Je suis encore un peu jeune mais en tout cas pouvoir faire ça, tout gérer, c’est vraiment hyper enrichissant. » Les voyages forment la jeunesse. Ils fabriquent aussi des champions. Après l’Espagne et Manacor, le prochain grand périple de Max Westphal devrait le mener sur le circuit ATP. En quête de son premier point chez les pros. Les pieds sur terre, la tête sur les épaules. Max Westphal peut voir l’avenir en grand.

 

Grégory MONNOT

(Photo: Walter Pintor)

 


 


Max WESTPHAL en bref

» Né le 04/06/2003, à Massy (91), France. 1,81 m; 72 kg.

» Club : TC Chevry 2. Classement : 1/6. Droitier.

» Palmarès : 
∴ Champion d’Essonne (2015, 2016, 2017) ; 
∴ Finaliste du TIM Essonne 2017 en simple et vainqueur en double ; 
∴ Finaliste du championnat de France 14 ans 2017 ; 
∴ Vainqueur du tournoi Tennis Europe Grade 1 de Riazan 2017.

Quand Max passe son brevet avant l’heure…

 


De l’autonomie vers la personnalisation

 

Même jour, même heure, même destin ? Comme Rafael Nadal, Max Westphal est né le 3 juin. Mais ce n’est pas le seul point commun qu’il partage avec son idole. Comme lui, il fait son revers à deux mains. Comme lui, il a dû choisir entre le foot et le tennis. Mais la ressemblance s’arrête là. A 14 ans, Rafael Nadal remportait le célèbre tournoi des Petits As. Un an plus tard, il disputait ses premiers tournois Challenger et se hissait à la 811ème place mondiale. Au même âge, Max Westphal n’en est pas encore là. Mais il espère suivre les traces de son modèle. « D’abord être top 100, si j’y arrive un jour, ce serait déjà une énorme étape de franchie. Et puis quand je serai top 100, là je pourrai me concentrer pour me dire “bon allez Max, si t’as fait top 100 pourquoi pas top 10, et ensuite top 10, pourquoi pas top 1“. Mon rêve, c’est d’être top 1 et de gagner un grand chelem, la Coupe Davis aussi. Ce rêve, j’espère qu’il va se réaliser. »

Pour exaucer son vœu, Max va devoir franchir une nouvelle ligne. Quitter son club, la ligue d’Essonne. S’éloigner un peu de sa famille, de ses coachs. Découvrir un nouvel environnement. Au même stade de sa carrière, Rafael Nadal avait été sollicité par la fédération espagnole pour intégrer le pôle de Barcelone. La famille de l’actuel numéro un mondial s’y était alors opposé. Pour Max, c’est le moment ou jamais selon son entraineur. « S’il veut basculer vers le top niveau mondial, c’est maintenant. Pas simplement le haut niveau, car il peut y accéder, être top 200 ou 300. Mais s’il veut être top 10, là il va falloir qu’il bascule, parce qu’au comité d’Essonne, on n’a pas la possibilité de mettre un mec à temps plein sur lui. Et pour aller au très haut niveau, c’est ce qu’il faut : un mec sur ton dos 360 jours sur 365. » L’une des dernières étapes dans son parcours initiatique. Entre autonomie, indépendance et professionnalisme. Max en a bien conscience. « En ce moment, je suis dans une structure qui me convient bien. Mais plus je vais grandir, plus ce sera compliqué parce qu’il faut plus de moyens, souligne Max. A l’avenir, j’espère intégrer l’Insep ou le CNE, car ce sont vraiment de super structures et je pourrai jouer avec de meilleurs joueurs qu’à la Ligue. Mais pour l’instant, je me focalise sur le présent. Je suis bien là où je suis. »

En pleine phase d’autonomie, difficile encore de faire le grand saut dans l’inconnu. Max ne veut pas jouer le match avant dans sa tête. En vrai besogneux, il se réfugie d’abord dans le travail, dans son quotidien, avant de penser à demain. « Je ne me projette pas trop dans deux ou trois ans. Je préfère me concentrer sur ce qu’il se passe en ce moment, faire mon petit bout de chemin, faire tout pour que ça se passe bien et ensuite voir ce que ça donne dans un an ou deux. » La suite justement. Une participation au tournoi ITF (International Tennis Federation) aux îles Canaries, un stage d’une semaine au pôle France de Poitiers, et le brevet des collèges en fin d’année. Quelques examens de passage dans la vie d’un jeune joueur à fort potentiel. Rafael Nadal avait gagné son premier Roland-Garros à l’âge où certains passent leur permis de conduire. Max, lui, est sur le bon chemin. Reste à prendre le bon virage.

 


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